Souvenir de Siseal

Souvenir de Siseal


Les Gardiens de Gallja… à travers mes yeux d’enfant, je ne pouvais les décrire autrement que comme des êtres fantastiques, mystérieux… magiques.

Je me souviens de ce jour… Je contemplais le crépuscule, en solitaire, quand soudain une magnifique lumière embrasa la forêt. Une apparition des plus étranges et des plus envoutantes… tels des milliers de cristaux d’une pureté incroyable. J’aurais dû me cacher, être plus prudent. Mais comment aurais-je pu me méfier d’une chose aussi belle ?

En m’approchant doucement, j’entendis des voix :
– Vite, nous devons traverser la faille avant qu’il ne soit trop tard.
– Spinner je te laisse fermer la marche. Assure-toi que tous les enfants aient bien traversé avant de nous rejoindre. Bon courage mon ami.
– Fais attention à toi Gallir. Nous ne savons pas ce qui nous attend de l’autre côté.
– Ne t’en fais pas pour moi !

– Siseal ne reste pas là.
D’un bond je fis volte-face, prêt à me défendre, armé de mes seuls poings frêles. L’une des prêtresses de l’orphelinat se tenait derrière moi, le regard inquiet, dans sa main une lame en argent recouverte d’étranges symboles qui semblaient prendre vie.

Incapable du moindre mouvement, je la sentis me tirer en arrière pour me protéger, juste avant que n’apparaisse un homme d’une beauté éblouissante… Le noir intense de ses cheveux tirés en arrière réhaussait parfaitement le blanc de son teint… son visage anguleux… ses traits fins… et cette mèche solitaire qui tombait devant son œil droit… irréel… J’ai appris à mes dépends que la beauté extérieure des êtres, quel qu’ils soient, ne les rend que plus dangereux.

– Pas un pas de plus si vous ne voulez pas gouter à mon hospitalité.
– Bonjour très chère. Je ne suis pas là pour me battre mais pour implorer votre clémence et obtenir asile.
L’homme s’écarta de la lumière, laissant apparaitre derrière lui de petites créatures rondouillettes. Je ne compris que bien plus tard que le peuple devant moi n’était autre que les fées de nos légendes… magiques… imprévisibles… invisibles et mystérieuses.

– Asile ? demanda Kaetilia en avançant d’un pas lent et sûr.

Son ton était froid.
D’où venez-vous ?

Elle prit place entre la prêtresse et l’homme, une boule de feu dans la main.

– De Gallja… l’Obscurité a envahi le cœur de nos peuples. Seuls les plus jeunes n’ont pas été corrompus, nous devons les sauver.
– Les plus jeunes… et vous ?

Je connaissais très bien ce ton… un ton empli de suspicion et de menace. Elle ne semblait nullement sous le charme de cet homme, et se méfiait… elle se méfiait de sa grande beauté, de ses paroles et de ses intentions. Personne n’aurait pu remettre en question le jugement de la grande prêtresse Kaetilia. C’était une femme dure et froide mais surtout juste et intuitive. Elle était capable de lire en n’importe qui, de le juger… et ce sans jamais se tromper.

Un autre homme apparut, très différent du premier, mais tout aussi beau… Sa peau dorée… de longs cheveux blonds tombaient sur ses épaules… et son regard bleu intense dans lequel je pouvais lire bienveillance et sagesse. Il me sourit et se tourna vers Kaetilia.

– Bonjour, je me présente… Spinner et voici Gallir. Veuillez nous pardonner pour cette apparition plutôt étrange… et soudaine. Nous sommes tous deux des Gardiens de Gallja, notre planète… elle se meurt…
– Alors c’est que vous avez failli à votre devoir ! répondit sèchement Kaetilia. Je me présente, Kaetilia. Gardienne de la Terre et grande Magicienne.
– Enchanté… Hélas, je crains que vous n’ayez raison. Nous avons failli… mais nous pouvons encore offrir un avenir à ces enfants du monde des Faelis. Ce sont des créatures douées de magie, qui vivent en parfaite harmonie avec la nature.
– Et ? qu’attendez-vous de nous au juste ?
– L’autorisation pour nous et les autres groupes qui auront réussi à traverser les failles, de rester sur cette planète.
– Rien que cela ? Vous ne doutez de rien ?
– Ces jeunes n’ont aucune chance sur Gallja. Nous vous promettons de ne jamais interagir avec les peuples de la Terre. Nous resterons cachés dans vos forêts, vos océans ou vos déserts. Leur magie et notre savoir pourraient vous être utiles.
– Je vais devoir rassembler le conseil des Magiciennes avant de vous donner une réponse. En attendant, vous pourrez rester dans notre village.

Un rugissement terrible fit soudain trembler l’air… une créature monstrueuse, mi loup, mi démon sortit de la faille les crocs et les griffes couverts de sang. Avec une rapidité et une fluidité irréelles, Spinner dégaina une étrange lame bleutée et décapita l’animal avant même qu’il n’ait eu le temps de poser un pied sur Terre.

– Je vais rester ici pour garder la faille. Gallir je te laisse accompagner Kaetilia et mettre à l’abri ces enfants. Ils ont besoin de se reposer.
– Avec plaisir. Madame je vous suis, dit Gallir en faisant une révérence grotesque devant la Grande Magicienne.

Contre toute attente Kaetilia sourit et prit la tête du petit groupe, sans un regard vers celui qui s’était porté volontaire pour garder la faille. Il ne pouvait pas rester ici tout seul? Lui aussi semblait épuisé.
Je peux rester avec vous? demandais-je alors à Spinner, d’une voix hésitante.
Si cela ne dérange pas les magiciennes, je suis d’accord. Je te remercie de me l’avoir proposé.

Kaetilia me foudroya du regard, puis dans un sourire mesquin ajouta:
S’il meurt il ne manquera à personne.

Texte de L.S.Martins

Image de ikon sur Pixabay : Niño Silueta Cielo Puesta De – Foto gratis en Pixabay

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